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Lectures - Page 3

  • Charles Juliet

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    «...Écrire pour panser mes blessures. Ne pas rester prisonnier de ce qui a fracturé mon enfance. Écrire pour me parcourir, me découvrir. Me révéler à moi-même.
    ... Écrire pour déterrer ma voix.
    Écrire pour me clarifier, me mettre en ordre, m'unifier. »
    Charles Juliet

     

    A la recherche d’une rime pour tenter de trouver une réponse à la poésie de Solidésir et « lambeaux » tombe, sanctionnant mon texte….(Sol le réutilisera de façon judicieuse...)  ;-)

    Et puis, le mois prochain, une rencontre avec Brigitte Giraud est programmée pas très loin de chez moi. J’ai bien envie d’y aller. Cette femme est sympathique, je l'ai rencontrée, il y a quelques années, j'apprécie son écriture, ses bouquins. Le programme parle de « parcours croisés ». Je ne connais pas l’autre écrivain invité, il me faut donc le découvrir avant la soirée.

    Il est prolifique ! Je cherche et mes yeux se posent sur « lambeaux » ce titre me parle. ;-)

    Au croisement de ces chemins, Charles Juliet !

    Né à Jujurieux ! Je connais ce petit pays dans l’Ain. Je le traverse (et m’arrête souvent à une pâtisserie pour y acheter une excellente tropézienne… comme quoi ;-))…. et continue un peu la route, jusqu’à bout de cette dernière pour passer des week-ends « à la campagne » dans un agréable petit bled paumé…. Il n’y a pas si longtemps on pouvait y acheter du lait bourru, mais il n’y a plus beaucoup de vaches. Alors restent les œufs frais, et  leur «vin blanc » moins connu que le Cerdon, mais tout aussi bon ! (Je le préfère au champagne).

    Enfin revenons à nos bouquins…. Amusant cette impression d’être « harponnée » par cet auteur… c’est même vraiment agréable !

    Hier soir, j’ai commencé Lambeaux, il m’a été difficile d’en sortir, trop envie de le dévorer d’un coup et puis non, je voulais le finir ce soir, pas tout d’un coup, histoire d’en garder quelques pages, d’en avoir encore un peu, plus tard… et là, à 21 h, je vous abandonne lâchement pour me laisser porter par cette plume. J’adore !

    C’est un livre autobiographique…court, touchant, écrit à la seconde personne du singulier.
    Une très belle écriture, simple, juste, précise, dépouillée, pudique.
    Une histoire émouvante, vraie…

    V'là donc mon dernier coup de foudre ;-) 

  • Christian Bobin

    99cc5ebb18684ffd8c166981445fd2cd.jpgSouvent mes lectures sont associées à quelqu’un qui m’a conseillé un livre, un auteur : Fred Vargas, les souffrances du jeune Werther, Le roi Tsongor, Fredéric Dard, Stephen King, Alexandre Jardin, Beigbeder. Ce n'est pas original me direz-vous ! ;-)

    J’ai suivi la plume de Christian Bobin grâce à une amie. Elle me parlait avec une telle admiration de cette écriture, et du livre : «Le Très-Bas»,  - l’histoire de St François d’Assise - pour lequel l'auteur a eu le prix des Deux Magots et le Grand prix catholique de littérature…. Mais elle semblait un peu déçue par mon manque d’enthousiasme… Aussi lorsque nous nous sommes revues, elle m’a mis ce petit bouquin entre les mains. Et du coup, je l'ai lu.... et je ne regrette pas ! Parce qu’effectivement…moi aussi… ;-)

    Que dire de cette dentelle, de ce fin ciselé, de ce style épuré, minimaliste.
    Christian Bobin parle si bien de la vie, de la nature, des petits plaisirs, des feuilles, des arbres, des fleurs, des enfants qui grandissent, des amours qui perdurent, du temps qui passe...
    mais aussi des grandes peines, des absences, de la solitude….

     Quelques citations de  Autoportrait au radiateur … : 

    Finalement je n’aime pas la sagesse, elle imite trop la mort. Je préfère la folie, pas celle que l’on subit, mais celle avec laquelle on danse.
    (J'avais aimé cette citation lue dans un forum ;-), je m'étais dit qu'il fallait que je découvre cet écrivain... et puis le temps passe... Et hop, le revoilà ! Comme quoi !)

    Ce soir, les fleurs et moi, on est fatigués. Rien de grave. Demain, j’inviterai de nouvelles fleurs et un nouveau moi.

    « Chez moi », c’est là où il y a assez de solitude pour qu’une rose y vive.

    L’art de la conversation est le plus grand art. Ceux qui aiment briller n’y entendent rien. Parler vraiment, c’est aimer, et aimer vraiment, ce n’est pas briller, c’est brûler. 

    Vert franchement vert, jaune franchement jaune, les tulipes ont une manière adolescente de simplifier le monde.

    Veux-tu savoir ce que je fais de mes journées, toi qui, patientant sous quelques mètres cubes de terre, n’accroches plus ton cœur à la girouette des soleils et des lunes ? C’est très simple : j’apprends à aimer les vivants comme je t’aime aujourd’hui, d’un amour calme et blessé, délivré du chaos des demandes.

    Voyons : qu’est-ce qui au juste me met au monde, ou plutôt m’y remet, puisque je suis enclin à le quitter sans arrêt ? Pour aujourd’hui, je peux répondre : un verre de vin blanc…la lecture… une pensée de toi.

    Ce n’est pas que j’aime tout le monde. C’est le contraire : j’aime « chacun » d’un amour souvent rude, guerrier par nécessité.

  • Le prix vont se ramasser à la pelle....

    2ab509c319451b46ded8edb9d7ca1016.jpgLes livres peuvent se diviser en deux groupes :
    les livres du moment et les livres de toujours. 
      John Ruskin

    Voilà quelques sélections de livres pour les Prix Goncourt, Renaudot, Femina et  Médicis qui vont bientôt tomber... Ils donneront ainsi l’occasion de découvrir de nouveaux auteurs, de vivre par procuration de nouvelles aventures ou de faire un brin de route avec des écrivains déjà appréciés….

    http://www.republique-des-lettres.fr/10066-prix-litteraires.php

    Je vous avouerai que je suis toujours en retard d’une guerre, aussi je n’ai rien lu !….

    Tant pis je "prendrai" les gagnants. Je sais ce n’est pas terrible, mais c’est mieux que rien…  Et puis si je n’ai pas lu les derniers bouquins de ces auteurs, certains, pour d'autres livres, sont déjà dans mon cœur depuis pas mal de temps…. ;-)

    Quelques intuitions, Ysalie, pour ce nouveau cru de Prix littéraires  ????

    Et vous les avez-vous lu ?

  • Philippe Forest

    2d67e52e4086f20c7ddeaf0c8c40b19f.jpg

    « Les critiques vous le diront tous : on reconnaît un écrivain distingué à ce que, affrontant un sujet aussi grave, il évite par-dessus tout l’écueil du pathos. Sourdine mise, pleurs retenus… Les grandes douleurs sont muettes… Ainsi l’intensité de l’émotion se mesurera-t-elle à l’épaisseur du bâillon posé sur la bouche… 
    Le mot d’ordre est : pas de pathos ! Mais qu’advient-il alors de la vérité et de son insupportable nœud vécu d’angoisse et de chagrin ? Trop vulgaire, n’est-ce pas ? 
    Je crains de décevoir. Question de dette contractée à l’égard de celle qui, hors de la page, a réellement connu la souffrance dont d’autres font les livres. L’écueil du pathos ? Je vais où le vent de la vie me pousse. Je mets le cap sur les récifs".
    Philippe Forest

    Certains livres s’imposent… . J’écoutais la radio en faisant mon ménage, et la voix d’un homme et ses propos m’ont charmée. Il évoquait la sortie de son dernier livre « Le nouvel amour ». Il m’a fallu alors découvrir son écriture…  et je suis tombée sur « L’enfant éternel »… Il avait évoqué ses livres précédents dans l’interview, je connaissais donc l’histoire dramatique, tragique qui lui avait été nécessaire de coucher sur le papier. Depuis hier soir, pas moyen de poser ce bouquin. ;-(

    Comment vivre après la mort de son enfant ? Pour avoir juste mis un pied dans l’antre de l’enfer, je peux dire que je me demande encore aujourd’hui, si cela est possible…

    Ce livre parle donc de la vie, de cette superbe petite fille, de cet amour infini, mais aussi de cette saloperie envahissante et exigeante, de ce père, de cette mère face à l'inconnu…

    Il y a aussi de très belles pages sur l’Ecriture, sur ce deuil subi aussi par Victor Hugo et Mallarmé...

    Pour une fois, je n’ai pas trop envie d’arriver à la fin que je connais déjà, mais les mots de Philippe Forest sont enivrants… et il est bien difficile de résister à ce tourbillon.... ;-(

    Je me suis un peu documentée sur cet homme :

    Écrivain français, né en 1962. Diplômé de l'Institut d'études politiques de Paris et Docteur ès Lettres, il enseigne durant sept années la littérature française dans les universités anglaises (Cambridge, Saint-Andrews). Actuellement professeur de littérature comparée à l'Université de Nantes. Il est l'auteur de nombreux essais consacrés à la littérature et à l'histoire des courants d'avant-garde, et quatre romans :

    • L'enfant éternel, 1998  - Prix Fémina du premier roman
    • Toute la nuit, 1999
    • Sarinagara, 2004  - Prix décembre
    • Le nouvel amour, 2007

    Il est  aussi critique littéraire, cinématographique et artistique.

  • Amélie Nothomb

    883582379.jpg« Quand on reçoit le dernier Nothomb on est prévenu : c’est la fin des vacances ! » ironisait Jean-Louis Ezine, critique littéraire du Nouvel Obs.

    Quoique le nouveau Nothomb est sorti en août…

    Ce sera « Ni d’Eve ni d’Adam »… dernier bouquin de cette écrivaine belge de langue française née le 13 août 1967 à Kōbe au Japon. 

    Elle écrit des quantités de livres, mais un seul est publié par an, la preuve :

    Ø       Hygiène de l’assassin, 1992 (Prix René-Fallet. Prix Alan-Fournier)
     Ø     Le Sabotage amoureux, 1993 (Prix de la Vocation. Prix Alain-Fournier, Prix Chardonne)
    Ø       Les Combustibles, 1994
    Ø       Les Catilinaires,  1995
    Ø       Péplum, 1996
    Ø       Attentat, 1997
    Ø      Mercure, 1998
    Ø       Stupeur et tremblements, 1999 (Grand prix du roman de l'Académie française)
    Ø       Métaphysique des tubes, 2000
    Ø       Cosmétique de l’ennemi, 2001
    Ø       Robert des noms propres, 2002
    Ø       Antéchrista, 2003
    Ø       Biographie de la faim, 2004
    Ø       Acide sulfurique, 2005
    Ø       Journal d’Hirondelle, 2006

     Les autres ne le seront jamais, il paraît qu’elle a laissé des consignes testamentaires…

    Je ne vous ferai donc pas le résumé de sa 15ène de bouquins (d’autant plus que j’ai un peu décroché au niveau des derniers…). Mais j’aime bien son écriture, et cette femme m’intrigue… J’apprécie son mystère (ange ou démon ?), l’originalité de ses histoires…  sa gravité, son ironie, son humour, sa cruauté, sa gravité…

    « Un auteur qui passe par la légèreté pour aborder des thèmes très violents. Elle possède une vision originale, marquée par un jeu permanent de contradictions. On a l’impression, à chacun de ses livres, de voir un train qui s’élance et qui déraille en même temps. Son univers possède un niveau de complexité qui résiste à l’analyse littéraire » selon Laureline Amanieux qui a fait une thèse sur « personnage et identité dans l’œuvre d’Amélie Nothomb », verdict louangeur confirmé par Jacques de Decker, écrivain, grand critique littéraire  « tout ce qui tourne autour du corps, en particulier, est unique chez elle, les lecteurs retrouvent dans ses livres l’expression d’un vertige, d’un vécu d’angoisse, qu’ils ne trouvent nulle part ailleurs. »

    Elle écrit le matin entre 4 et 8 h, assise sur un vieux canapé, un petit cahier sur les genoux, un stylo usagé..1/2 litre de thé très noir, pas de tél. portable, d’ordi…

    Très ritualisée « tout mon quotidien est structuré de manière à  échapper à l’angoisse »

    Alors qui n’a pas pu résister au dernier Nothomb ?

      Et juste pour se mettre l’eau à la bouche quelques citations :

    Péplum :
    Il y aura toujours dans la foule un crétin qui, sous prétexte qu'il ne comprend pas, décrétera qu'il n'y a rien à comprendre.

    Hygiène de l'assassin :
    L'écriture commence là où s'arrête la parole, et c'est un grand mystère que ce passage de l'indicible au dicible.

    Attentat ;
    Si le corps humain comportait vingt-cinq sexes au lieu d'un, il perdrait beaucoup de son pouvoir érotique. Ce qui fascine, ce sont les îlots.
    Il faut en soi beaucoup de substance pour être capable d'estimer un créateur, a fortiori pour déterminer sans " l'aide " de quiconque s'il est estimable. Or la plupart des gens ne contiennent pas ou peu de substance. C'est pourquoi il y a tant de fans et si peu d'admirateurs, tant de contempteurs et si peu d'interlocuteurs.
    La rose qui meurt de soif a besoin du jardinier, mais le jardinier a encore plus besoin de la rose qui meurt de soif : sans la soif de sa fleur, il n'existe pas.

    Mercure :
    La laideur, c'est rassurant : il n'y a aucun défi à relever, il suffit de s'abandonner à sa malchance, de s'en gargariser, c'est si confortable. La beauté, c'est une promesse : il faut pouvoir la tenir.
    À quoi serviraient les morts, sinon à aimer les vivants davantage ?

    Les Combustibles :
    Je suis un intellectuel, c'est-à-dire un être qui attend passionnément qu'on le contredise.
    Le risque, c'est la vie même. On ne peut risquer que sa vie. Et si on ne la risque pas, on ne vit pas.

    Cosmétique de l’ennemi :       
    C'est drôle ce besoin qu'ont les gens d'accuser les autres d'avoir gâché leur existence. Alors qu'ils y parviennent si bien eux-mêmes, sans l'aide de quiconque.     

    Les Catilinaires :  
    Affronter un bavard est une épreuve, certes. Mais que faire de celui qui vous envahit pour vous imposer son mutisme ?      
    Il est des maisons qui donnent des ordres. Elles sont plus impérieuses que le destin : au premier regard on est vaincu. On devra habiter là.       

    Métaphysique des tubes :
    L
    a meilleure raison, pour se suicider, c'est la peur de la mort.     
    On n'a rien inventé de mieux que la bêtise pour se croire intelligent.
    La mort, comme un terrier, comme une chambre aux rideaux fermés, comme la solitude, est à la fois horrible et tentante : on sent qu'on pourrait y être bien.
    Vivre signifie refuser.

    Le Sabotage amoureux :
    Quand je serai grand, je penserai à quand j'étais petit.  

  • Philippe Besson

    987054f26b6a2c97ca1a97515e8ccfa4.jpgd3c09defa8ac8352e70ca551faa59500.jpg« Un jour, après m’être familiarisé avec les mots à travers la correspondance,  j’ai eu le désir d’un livre. D’inventer une histoire. De ne pas raconter la vérité de tromper mon monde. »

    Effectivement Philippe Besson, avec un rire malicieux m’avait répondu quand je lui demandais comment il était possible d’écrire un livre comme Son frère, sans une part de vécu ? … qu’il était ravi de nous raconter des histoires, de nous mentir, de nous piéger…

    Une belle rencontre avec cet auteur qui se qualifie d’ « écrivain du sensible » 

    « La mer est très présente dans ma vie. J’ai grandi près de la mer. C’est une obsession personnelle, c’est apaisant, rassurant. J’écris beaucoup au bord de la mer. Les plages sont les seuls lieux qui ne nous déçoivent jamais et que la mémoire ne salit pas. J’ai de beaux souvenirs de plage. »

    En l’absence des hommes  son premier roman (mon préféré +++)

     Une critique qui résume bien ce bouquin que j’ai adoré :

     « En l'absence des hommes est le récit pudique et sensuel d'un jeune homme entre deux amours pendant la Première Guerre mondiale. D'un côté, le Ritz proustien; de l'autre, un ange sous les balles. Celui-ci mourra, bien sûr, et sa mère parlera à Vincent, remontera pour lui le fil de son histoire à elle. Tout cela est raconté par Philippe Besson avec une finesse et une sensibilité fort prometteuses. C'était un défi, cette double histoire d'amour: P. Besson a su le relever sans effet, sans pathos. » Michel Crépu.

     Beaucoup de sensualité, de délicatesse dans ce livre…. je vous en livre quelques extraits :
    16 ans : "Vous dites : à seize ans, on croit n’avoir pas de souvenirs, on croit n’avoir qu’un avenir. En somme, là où vous avez raison, cent fois raison, c’est que la vie vous attend, comme un boulevard qui s’ouvrirait devant vous, comme une allée vierge et dont on ne sait pas la fin. Là où vous avez tort, cent fois tort, c’est que peut-être l’essentiel s’est déjà joué, que tout s’est formé dans l’enfance(...)."
    je ne suis plus un enfant. Il ne faut pas se fier aux yeux verts, à la peau de fille, à cette fragilité de l’apparence, à la gracilité. Il ne faut pas croire que les yeux baissés, c’est forcément de la timidité. Je sais ce que je fais. Seize ans, c’est l’âge des possibles. Pourquoi m’interdirais-je quoi que ce soit ?"
    La guerre : .. "monter à l’assaut c’est consentir à mourir et c’est désirer vivre, avec ferveur, avec rage et ce désir fervent, rageur de vivre, il ne peut s’exprimer que par la mort de l’autre, de l’ennemi. La guerre est un balancier. On ne vit que si l’autre meurt. Et nous ne gagnerons que si les autres meurent plus vite que nous, et en plus grand nombre. C’est aussi simple que cela…"
    "Il y a dans tes gestes plus de vigueur que d’ordinaire, comme si la possession t’importait davantage, comme s’il te fallait prendre le dessus d’emblée, ou comme si tu te vengeais de quelque chose, de quelque mauvais sort qu’on t’aurait fait. Je consens à cette violence car je crois deviner qu’elle est un exutoire."
     
    "Ce geste-là, de faire aller et venir ma main sur ta nuque, sur les cheveux courts, est un geste d’intimité pure, celui des amants éternels. Il nous amené là où personne ne peut nous rejoindre…"
    Nécessité d’écrire : "Je t’écris parce que c’est impossible de ne pas écrire, impossible de demeurer muet, impossible de ne pas tenter de te rejoindre par les mots, impossible de te chasser de mes pensées et quand ces pensées virent à l’obsession, l’écriture devient exutoire, une thérapie."

    Son frère : - Son deuxième roman
    Un petit résumé :
    Thomas meurt d’une longue agonie. Son frère (ils sont presque jumeaux et pourtant si différents…) Luca le narrateur est là, et l’accompagne, jusqu’au bout… C'est un chant funèbre,  beaucoup de délicatesse, de tendresse, d’amour, d’espoir et de déception.
    J’ai encore un peu de mal à parler de ce bouquin que j’ai lu, il y a pourtant pas mal de temps, mais l’émotion est encore là…. Et la mise en image de Patrice Chéreau était remarquable et traduit toute cette intensité de douleur, de détresse…
    Quelques citations : 
    « C’est cela que je suis, son frère… Je ne me souviens pas d’avoir été autre chose que son frère ».
    "Depuis six mois, lorsque je m’assois devant le clavier, c’est de la maladie dont je souhaite parler, c’est d’elle uniquement dont je puis parler. Alors, j’ai fait ça, abandonner le roman en train de se faire, et j’écris à propos de Thomas , je raconte la vérité pour la 1ère fois, je suis dans le réel. J’ignorais que les mots pouvaient dire le réel."
    "C’est seulement chez ceux qui se pratiquent depuis tjrs qu’on observe cette symbiose…il y a cette absence d’ambiguïté dans le frôlement des corps, qui achève de convaincre qu’il n’y a pas d’enjeu de chair, mais simplement une affection totale, intègre de chacun pour l’autre."
    Les soins : "Je devine que surviendra immanquablement un temps ou il cessera d’obéir."
    L’absence, le manque, la perte : "Je pense qu’il en va ainsi, sans doute, après la mort des autres, ceux qui nous étaient proches, lorsque arrive le temps du deuil. Je pense que c’est grâce à leurs objets familiers, grâce aux traces qu’ils ont laissées, le plus souvent involontairement, qu’on les rejoint le plus facilement."
    Comment accepter sa défection à lui, son éclipse ? Comment supporter l’insupportable béance et le manque affreux de lui ? Comment continuer avec la privation de lui, le défaut de lui ?
    "On n’est pas préparé à la perte, à la disparition d’un proche. Il n’y a pas d’apprentissage de cela. On ne sait pas acquérir l’habitude de la mort. La mort de l’autre nous prend forcément par surprise, elle est un événement qui nous désarme, qui nous laisse désemparé, y compris lorsqu’elle est prévision, le plus prévisible des événements. Elle est une occurrence absolument certaine et cependant pratiquement inconcevable, et qui nous précipite dans une étrange hébétude… La douleur, elle frappe là où ne s’y attend pas, quand on ne s’y attend pas. Elle est pure comme peuvent l’être certains diamants, elle est sans tache, éclatante. on est seul avec cette pureté-là, cette blancheur insoutenable de la douleur. On détourne le visage, on ferme les yeux, les larmes viennent dans le silence, même quand, autour de soi, règne le plus grand désordre.
    Et si on ne dit rien, c’est parce qu’on ne sait rien dire, on ne sait pas parler de la mort.
    Parfois, quand même, on finit par parler, on utilise des termes cliniques… on fait cela pour se divertir de la douleur, pour l’oublier un moment, pour s’en éloigner un peu, pour la tenir à distance, mais parler de la mort, ce n’est pas dire la mort. Dire la mort, c’est une chose impossible. Dire ce que c’est, ce qu’on ressent, ce qui arrive, ce à quoi on est en proie, on ne sait pas." ….fin

     « On ne va pas contre la volonté de l’océan »  

    Un Instant d’abandon…
     Un petit résumé :
    A la pointe des cornouailles, à Falmouth, ville de bord de mer (mer tjrs présente dans ses bouquins)… Thomas, rentre au pays après avoir payé sa dette à la société. Il y a 5 ans, il était rentré au port seul après une journée en mer avec son fils… son fils ??
    Il lui faut dorénavant vivre avec les regards des autres, avec sa culpabilité (avoir voulu l’irréparable, parce que cela devenait le seul exutoire…) 
    Il se raconte à Rajik l’épicier pakistanais, il est aimé par Betty la vendeuse de journaux, mais attend le retour de....
     Ce roman ne m’a pas passionnée, même si l’écriture de Philippe Besson est très agréable. L'atmosphère est pesante, il ne se passe pas grand chose, c'est un peu "mou"... l'évocation de la mort, du milieu carcéral...
     Une citation :
    « Je reviens avec mon mort. Je le ramène avec moi. Je transporte un cadavre.
    J’ai ça avec moi, un cadavre.
    Pour toujours.
    Quoi que je fasse, il sera là, toujours, avec moi, ce cadavre (…)
    Ils ne verront que ses huit ans massacrés, anéantis en un seul mouvement. Je sais qu’il ne me quitte pas, ce mort. Mon fils. »

     

    Oups, il va encore falloir vous parler d'un Garçon d'Italie, de l'Arrière-saison et des autres bouquins de cet auteur...
    "Il n'y a pas de hasard, il n'y a que des rendez-vous qu'on ne sait pas lire". Jérôme Touzalim

    Alors juste avant de prendre l'avion pour aller en Irlande. Mon père me donne un ch'tit bouquin (échantillon de 10 x 15 cm) minuscule et devinez de qui : Philippe Besson. "Les Amants", une nouvelle inédite Elle/Julliard, j'imagine qu'il était offert par cette revue féminine. J'avais prévu d’autres lectures pour le voyage, et puis il a fallu que celui-ci s’impose encore ! ;-)
     C'est l'histoire d'un type de 25 ans qui tombe amoureux d'une "vieille" écrivaine de plus de 40 ans... Il lui écrit, et s'aiment...

    Je me suis dit que je le lirai et pourrais laisser ce petit truc n'importe où, et puis non il est revenu au pays !!!

    C'est terrible d'être sentimentale à ce point...  

    et comme le dit P. Besson : "les écrivains ont pour seul talent de retenir davantage que les autres, et de savoir réutiliser, recycler.... en réalité, ce sont des voleurs. Ils volent l'intimité de ceux qu'ils croisent et ne font le matériau de leur livres. Tout ça n'est pas très reluisant, quand on y songe. Si vous les admirez, vous avez tort. Arrêtez tout de suite"  

    et son dernier livre :  Se résoudre aux adieux…
    Quelle justesse de ton ! Philippe Besson aurait-il été une femme dans une autre vie ?
    L’amour fou, dévastateur... « je me suis lancée dans une aventure qui allait me dépasser.  
    Voilà. J’ai été une parenthèse, un divertissement, une diversion dans le meilleur des cas. Inutile de se creuser la tête davantage. Mais de n’avoir été que cela, et de le savoir, ne rend pas la douleur moins vive, hélas.
    Si tu étais mort, je ne t’aurais pas perdu davantage.
    En réalité, j’étais condamnée à te décevoir, d’une manière ou d’une autre. C’est ce qu’on appelle la quadrature du cercle. Je m’y suis perdue… Il faut aimer les gens beaucoup pour les accepter tels qu’ils sont. Tu ne m’aimais pas assez."
    La souffrance, le besoin de comprendre
     "La nécessité de savoir l’emportait sur la crainte de le regretter..
    Jamais je n’ai envisagé ce que nous pourrions devenir ensemble. Jamais poursuivi le moindre objectif. Ce qui comptait, c’est que tu sois là ou que tu l’aies été. Je présumais que tu serais toujours là…
    Et si l’Italie, c’était revivre enfin ? Ne plus être écrasée par les souvenirs mais apprendre à vivre avec eux, ne plus être écrabouillée par le chagrin mais le dominer, ne plus être dans le ressassement mais simplement dans l’effleurement. Ce serait bien alors. Je serais sur la voie de la guérison...
    Quel crime ai-je donc commis pour mériter pareil châtiment ? De quelle atrocité suis-je coupable pour subir un tel ostracisme ? Ce bannissement est pire qu’une sentence de mort…. Le sentiment amoureux.. on ne s’en débarrasse pas comme cela, comme d’un vieux vêtement qu’on jugerait tout à coup démodé, importable, qui nous ferait honte. Moi, j’ai de la tendresse pour mes veilles robes, elles me parlent de ma jeunesse
    . "
    La nécessité de s’éloigner.
    La Havane, New-York, Venise, Orient-Express, Paris Ce sont les détails qui me crèvent le plus le cœur. … La Havane, pas de souvenirs… je ne risque pas la chute à tout moment.
    Et puis quelques phrases que j’aime bien :
    Guérit-on jamais des hommes qui nous quittent ?
    ...Les gens quittés sont pitoyables.
    ...Les amoureuses renoncent à une part d’elles-mêmes. C’est même à cela qu’on les reconnaît.
    Une belle définition du verbe aimer :
    "Aimer, ce n’est pas emprunter des routes toutes tracées et balisées. C’esta avancer en funambule au-dessus de précipices et savoir qu’il y a quelqu’un au bout qui dit d’une voix douce et calme : avance, continuer d’avancer, n’aie pas peur, tu vas y arriver, je suis là."
    Sur l’écriture :
    "On n’écrit jamais pour les autres, jamais. On n’écrit que pour soi. On prétend dialoguer mais tout n’est que soliloque."

  • Tir groupé : Mme de Sévigné, René Barjavel, Yves Bichet

    Besoin d'évasion... donc juste un petit saut à la plage, histoire d’apprécier la grande bleue à 24°C… très agréable……
    Puis un tour en Drôme provençale, soleil, piscine privée, lavande, cigales… très, très agréable !

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    Petit bémol : pas moyen d’assister au spectacle donné au Château de Grignan, c’était complet. Tant pis, je reviendrai !
    Je n’avais déjà pas pu aller au Festival de la correspondance…
    Que de rendez-vous manqués… Un jour peut-être ?

    d91bdafe7906c23587d343d87e0e03ec.jpgDonc promenades dans Grignan, charmant village au pied de cet imposant château où Madame de Sévigné écrivit à sa fille, Madame de Grignan, à peu près pendant trente ans, chaque semaine trois à quatre lettres.

    Quelques lettres de la Madame de Sévigné sur ce site découvert pas hasard… vous y trouverez celle où il est question de son fiston…. "Son dada demeura court à Lérida"
    Et d’autres plus sérieuses….
    http://web17.free.fr/DRD01/index.htm

    Je n’ai pas chercher la maison d’Yves Bichet… Je sais que son premier métier étant maçon, il a construit lui-même sa demeure à Grignan. J’ai découvert cet auteur par la lecture de son livre, Les Terres froides, où il évoque son enfance. C’est une succession de petites histoires de souvenirs.
    « L'isolat d'Izeaux - Je suis né en Isère, dans la région des Terres froides. Cette partie du Dauphiné compte à peine quelques milliers d'habitants... Les T. Froides se situent entre le lac de Paladru, connu pour s cité lacustre et ses chevaliers-paysans de l'an mille, le bourg de Torchefelon et autre village fameux, Izeaux, qui accueille depuis des 5c23f0a9fcd1751c60dc6fb778843408.jpglustres la foire agricole de Beaucroissant.
    ...
    Je crois que se retourner vers l'enfance, c'est d'abord chercher des coupables.
    ...
    Et, après, un automne qui resplendit, abuse de ses propres couleurs, flamboie, s'achève exsangue un soir d'octobre, étranglé, atone et sans relief, feuillages et splendeurs rendus à qui de droit. »

    J’avais continué par La Part animale. "Ce roman traite de l'animalité. Il est en partie autobiographique. Il m'a donc semblé honnête de laisser ici la poésie jouer son rôle ; le rôle qu'elle tenait jadis lorsque je découvrais les yeux des bêtes. D'ordinaire, l'animalité n'est considérée que sous l'angle de la morale ou sous l'angle plus réducteur de la psychanalyse. Je pense que ces deux voies sont l'une et l'autre des impasses. Mon personnage finit par préférer la part animale qui affleure en lui ; et pour aimer, par jalouser la part divine qu'il pressent chez les animaux. Cette conscience-là, cette acceptation aurait pu, poussée à ses limites extrêmes, le projeter vers le pouvoir, vers la sagesse, ou bien encore vers la poésie. Rien de tout cela ne m'est arrivé. Pourtant Rilke est resté présent. Et les dindons aussi. Tout comme le désir de parler
    ."
    J'avais bien aimé les tribulations de ce masturbateur de dindon...
    Il a en écrit d’autres depuis, son dernier est Le Porteur d'ombre...
    "Jamil, rescapé d'un voyage clandestin dans un train d'atterrissage, rencontre Léandra, une jeune mère élevant seule son enfant. Jamil ne parle pas, ne révèle rien de son passé. Il vit dans les airs et y entraîne Léandra.
    Un monde s'ouvre, vertigineux, au moment où Jamil est accusé de meurtre. Léandra s'obstinera à comprendre le secret de cet ange mutique
    ."

    J’ai rencontré Yves Bichet, l’année dernière lors d’une avant-première, car la Part Animale a été mise en images par Sebastien Jaudeau. C'est le premier long métrage de ce jeune réalisateur.
    Le film est aussi bon que le livre... Différent, mais tout aussi bon. Je crois qu’il doit sortir sur les écrans prochainement.

    Et pour finir, découverte de Nyons, bain de foule au marché très coloré des potiers, dégustation de quelques olives. (Je sais maintenant que l’olivade est de la tapenade sans câpre ;-)…).
    3c3ab70395d559e7df9fc66362ddef4c.gifNyons est très joli aussi, petite pensée à René Barjavel, et sa Charrette bleue. La boulangerie de ses parents existe-t-elle encore ?. On est bien loin des glaces de la Nuit des temps, loin de cet amour impossible, (Simon aime Eléa, mais Eléa est à Païkan et il faut faire avec Coban… ou plutôt contre…)). J’ai adoré ce bouquin. Je crois que c’est un de ceux que j’ai le plus acheté, pour offrir… Et la beauté de ces lettres…. (Longtemps j’ai rêvé que quelqu’un me déclare sa flamme de la sorte …)
    « Je suis entré, et je t'ai vue.
    "Et j'ai été saisi aussitôt par l'envie furieuse, mortelle, de chasser, de détruire tous ceux qui, là, derrière moi, derrière la porte, dans la sphère, sur la glace, devant leurs écrans du monde entier, attendaient de savoir et de voir. Et qui allaient TE voir, comme je te voyais.
    Et pourtant, je voulais aussi qu'ils te voient. Je voulais que le monde entier sût combien tu étais merveilleusement, incroyablement, inimaginablement belle. Te montrer à l'univers, le temps d'un éclair, puis m'enfermer avec toi, seul, et te regarder pendant l'éternité
    . »

    Je comprends ce désir de rester dans cette Drôme provençale très charmeuse, j’ai bien pensé qu’il doit être bien agréable de vieillir dans ce pays…

    Et puis retour à la maison, plaisir de venir faire un tour ici, de faire mon rapport.
    J’espère que vous passez un agréable été vous aussi…

    5cb1dbbf1b013547bf9ad9b84ec72541.jpg

     

  • Laurent Gaudé

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    J'ai connu moi aussi, plus d'une fois, la douleur de la perte. Je sais le voluptueux vertige qu'elle procure. Il faut te faire violence et déposer le masque de pleurs à tes pieds.
    Ne cède pas à l'orgueil de celui qui a tout perdu.
    Laurent Gaudé -  La mort du roi Tsongor 

    Découverte de Laurent Gaudé.
    J’ai commencé par Cris…  : la guerre des tranchées (quel réalisme, quelle boucherie, quelle connerie la guerre !) et ce cri qui résonne encore… ;

    Puis j’ai lu Eldorado : (la clandestinité au prix fort, bouleversant - j'ai pensé un peu à la liste de Schindler... à cet homme qui regrettait de ne pas avoir fait plus...). Me reviennent alors des images de reportages de l’émission Envoyé Spécial, parce qu’à l’heure actuelle combien d’hommes sont en train de vivre ou de crever dans de telles conditions. N’y a t’il pas de place pour que tout le monde puisse vivre dignement sur cette terre ?

    J’ai poursuivi par : La mort du roi Tsongor et là franchement, quelle ingéniosité... Il y a plein de petites "trouvailles" qui m'ont charmée. Belle écriture au service d'une épopée incroyable. (Là, j'ai eu un peu l'impression de revoir le film sanglant 300, les cadavres empilés et les guerriers surprenants... heureusement qu'il y a de l'amour, quoique... )
    Arrivée à la fin, je me demandais comment l'auteur allait terminer sans me décevoir, et bien pari tenu !

    Me reste encore à découvrir quelques uns de ses bouquins…  "Le Soleil des Scorta"...  pour lequel il a eu le Goncourt en 2004.

    Autant de livres, autant d'univers différents, une belle plume, vraiment de très bons moments en compagnie de Laurent Gaudé... ;-) 

  • Bonnes lectures

    980b20989b467bb508176260f7008b9a.jpgMais késketuli en ce moment Thomas ? Ysalie ? et toi Tommie ?

    A tous ceux qui sont de passage, ici, auriez-vous quelques conseils de lecture pour cet été ?…

    Merci ;-)

  • Stefan Zweig

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    "Vieillir n’est au fond, pas autre chose
    que n'avoir plus peur de son passé".

    Stefan Zweig, pour moi peut-être bien, certainement, le plus grand !

     J’aime son sens magistral de la psychologie  dans l'analyse des comportements humains (admirateur et ami de Freud). Romain Rolland lui attribuait "ce démon de voir et de savoir et de vivre toutes les vies, qui a fait de lui un pèlerin passionné, et tjrs en voyage ».

    Incroyable, cet amour, cette curiosité de l'autre... ce respect.  . Jamais aucun jugement, aucune critique, toujours une grande humanité, un tableau d'une réalité époustouflante, la description de la passion « en ce qu’elle a d’irrésistible et de semblable à la folie », de la souffrance, de la douleur, du décalage, de l'incompréhension.
    "Il aime par l'intelligence. il comprend par le cœur" disait Romain Rolland.

    En 1914 il déclare la guerre à la guerre, utilisant à cette fin l'arme de la création littéraire. La catastrophe des années quarante lui apparaît comme la négation de tout son travail d'homme et d'écrivain...
    En 1942, désespéré de voir les succès du nazisme en Europe, Stefan Zweig se suicide en compagnie de sa femme.

    Il écrit alors ce message d'adieu (en 1942) :
    "Avant de quitter la vie de ma propre volonté et avec ma lucidité, j'éprouve le besoin de remplir un dernier devoir: adresser de profonds remerciements au Brésil, ce merveilleux pays qui m'a procuré, ainsi qu'à mon travail, un repos si amical et si hospitalier. De jour en jour, j'ai appris à l'aimer davantage et nulle part ailleurs je n'aurais préféré édifier une nouvelle existence, maintenant que le monde de mon langage a disparu pour moi et que ma patrie spirituelle, l'Europe, s'est détruite elle-même. Mais à soixante ans passés il faudrait avoir des forces particulières pour recommencer sa vie de fond en comble. Et les miennes sont épuisées par les longues années d'errance. Aussi, je pense qu'il vaut mieux mettre fin à temps, et la tête haute, à une existence où le travail intellectuel a toujours été la joie la plus pure et la liberté individuelle le bien suprême de ce monde. Je salue tous mes amis. Puissent-ils voir encore l'aurore après la longue nuit ! Moi je suis trop impatient, je pars avant eux."

     J’ai terminé, il n’y a pas très longtemps les livres de poche de la collection "Classiques Modernes" de la Pochothèque, vous savez cette collection imprimée sur du papier cigarette....
    Deux volumes regroupent romans, nouvelles et Théâtre de Zweig..
    A lire absolument. ;-)