Un Werther’s original
"On conserve les lettres, pour ne les relire jamais,
finalement on les détruit, par discrétion,
et ainsi disparaît sans retour, pour nous et pour d’autres,
le plus beau souffle de vie et le plus direct.
Je me propose de réparer cette négligence.."
Johann Wolfgang Von Goethe
IL y a quelques mois, j'ai succombé sous le charme de Werther à la lecture du remarquable "Les Souffrances du Jeune Werther" de Johann Wolfgang Von Goethe (merci Bob).
Comment ne pas souffrir dans la description de cette "passion réfléchissante, la passion qui se juge elle-même et se connait sans pouvoir se dompter" écrivait Madame de Staël.
Goethe disait "je n'ai relu ce livre qu'une seule fois depuis sa parution ; et je me suis bien gardé de le relire ensuite. Ce sont de vraies fusées incendiaires. Ce livre m'est pénible, et je crains toujours d'éprouver à nouveau l'état pathologique où il a pris naissance".
Genre d'histoire où tout peut basculer et si tu t'en sors, tu ne t'en sors pas indemne... Certaines douleurs ne sont pas "re-imaginables", principalement les douleurs physiques, pour d'autres plus "spirituelles" (même si le mal est souvent aussi très physique), c'est un peu comme s'il suffisait d'un souffle sur la cicatrice pour en percevoir de nouveau toute l'intensité... Quoique pour Goethe, relire son livre, n'a rien d'un souffle, ce serait plutôt une grosse tempête.
Il parait que l'on se suicidait "à la Werther"... Mme de Staël écrira que "Werther a causé plus de suicides que la plus belle femme du monde.."
J'ai donc pensé qu’il me fallait prendre de la distance avec ce livre quelque peu « vampirisant » avant de revenir à l’écriture de Johann Wolfgang von Goethe. C’est donc chose faite avec les « Les Affinités électives ».
Même s’il est moins "puissant", j’ai bien aimé.
L’auteur part d’un principe chimique :
« Il y a séparation et formation d’un nouveau composé, si bien que l’on se croit désormais autorisé à employer le terme d’affinité élective, car tout se passe réellement comme si une des combinaisons se voyait préférée à l’autre, choisie plutôt que l’autre » …
qu’il va appliquer à la complexité des sentiments :
« Toi, Charlotte, tu représentes A, et moi, je suis ton B, car en fait je ne dépends que de toi, et je te suis comme B suit A. Le C est de toute évidence le Capitaine, qui cette fois me dérobe en quelque sorte à toi. Dès lors, il est juste, pour que tu ne sois pas condamnée à fuir dans l’indéterminé, qu’on te procure un D, et c’est, sans aucun doute, l’aimable petite demoiselle Odile, à la venue de laquelle tu ne dois pas t’opposer plus longtemps. » (pp. 77-78)
« Imaginez entre A et B une union si intime que de nombreuses tentatives et maintes violences ne réussissent pas à les séparer ; imaginez C pareillement lié à D ; mettez les deux couples en présence : A se portera vers D, C vers B, sans qu’on puisse dire qui a quitté l’autre le premier, qui s’est uni à l’autre le premier. »
En pratique :
Onprend alors un couple heureux Edouard et Odile, auquel vient se joindre : le capitaine (ami d’enfance du premier) puis Odile (nièce d’Odile). Que pensez-vous alors qu’il advienne ?
Et bien il faut le lire…. ;-)
En guise de conclusion (où tout est dit....) une citation de l'auteur :
«Les grandes passions sont des maladies sans espoir :
ce qui pourrait les guérir ne fait que les rendre vraiment dangereuses.»