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Mon papa à moi....

Atavisme : Transmission continue, de génération en génération,

des caractères héréditaires physiques ou moraux…

Papa

Il n'y a pas très longtemps, j’avais préparé un texte pour le baptême et l’anniversaire de mon petit-fils, j’évoquais mes origines, consciente de ma richesse parce qu’étant de sang mêlé. En effet, je suis un savant mélange d’un caractère bien trempé d’un Jean... et du tempérament fougueux d’une italienne, Miranda...., venue du Frioul. 

J’ai perdu ma maman, le jour de la fête des mères en 2004, maintenant, c’est au tour de papa, le jour de la fête des pères en 2019… Dorénavant, il me faut accepter d’être orpheline !

Je ressens la nécessité de rendre hommage à ce que m’a transmis mon papa, ces lignes de force qui font que je suis la dernière de cette lignée, porteuse de ce nom en voie de d’extinction !

Un jour, je ne serai plus, aussi j’aimerais que mes enfants se souviennent…

Bien sûr, ils ont leurs propres souvenirs et ils sont si nombreux, tant de bons moments passés avec leur « Papi bateau » !

Là, je veux partager mon regard, pas celui d’une femme ou d’une mère, mais celui d’une fille… un peu paumée ces jours… parce que le père, celui qui guide, a l’expérience, aide, rassure, n’est plus ! Il me faut préparer mon viatique pour continuer la route sans lui…. 

Ces derniers temps, il avait bien conscience « d’être passé près » plusieurs fois. Il voulait dorénavant en profiter ! Sage décision ! Je ne pouvais plus rien dire pour les tartines beurrées à outrance, pour les plats dont il se resservait plusieurs fois en riant. Et quand il ne le faisait pas, proclamait en se moquant un peu de moi, « jamais deux fois, j’ai une hygiène de vie ! ».  

Sacrément fragilisé... Le médecin rencontré peu avant nous avait dit « de prendre les bons moments et de ne rien lui interdire ! ». J’étais partie de cet entretien en pleurant, bien consciente que mon papa était condamné.

Mais comme tout le monde, on n’imagine pas que les forces de la nature puissent s’écrouler et mordre la poussière !

Mon Papa,

Était un joueur… hors pair… il avait un côté « j’essaie, on verra bien » …  Il aimait aussi les cartes, les jeux de société… Expert en tarot, jeu que je ne maîtrise pas, mais tout comme lui, j’aime la belote, la coinche, le Rummikub… Dès ma plus jeune enfance, je voyais mes grands-parents, mon père, jouer tout un après-midi ou partir dans des soirées interminables à taper le carton…

Cultivait l’art de la récup, du « ça peut servir », même si quand le besoin se fait ressentir, les recherches sont infructueuses, alors on rachète, et parfois on retrouve après. C’est un trait de caractère qui exaspère parfois les autres, je peux en parler…  Pourtant quelquefois cela donne de bons résultats aussi ! C’est un peu l’art de l’envahissement de choses souvent inutiles ou dont on n’arrive pas à se séparer…  Il faut alors être aussi bricoleur, comme un bon cuisiner peut s’accommoder des restes. Papa savait tout faire de ses dix doigts, il n’y a pas très longtemps, il m’apprenait encore à faire du crépi, je regrette qu’il n’ait pas eu le temps de m’apprendre la soudure à l’arc. Excellent bricoleur, c’était un esprit en éveil, un fourmillement d’idées… « y’a pas de problème ! » une solution pour tout !

Cuisinait, aimait recevoir et manger ! Une longue lignée de bons mangeurs… Déjà son grand-père, baroudeur, pêcheur, servait le lapin prisonnier du collet ou le poisson attrapé dans son carré à la Mulatière.

Sa mère (ma grand-mère) nous régalait avec des gâteaux minutes faits, sans pesée, auxquels elle ajoutait quelques cuillères de sa confiture maison quand arrivait quelqu’un à l’improviste. J’aimais ces salades de pourpier cueilli dans le jardin et préparées avec elle.  Mon grand-père parfois se mettait au fourneau pour nous faire une fameuse recette… il sortait alors tous les plats (les petits et les grands), que seule ma grand-mère lavait et rangeait ensuite ! Tout le mérite revenant au grand cuisinier !

Papa, à son tour, préparait de bons petits plats et surtout soignait l’apparence. Les buffets à volonté ne lui ont jamais fait peur, et ce fameux coup de fourchette est partagé depuis longtemps dans la famille ! Papa aimait partir à l’aventure, espérant « taper » ça ou là quelques lapins dans les chemins. Il faisait des parties de pêche mémorables avec ses petits-fils, tant de petites fritures, dont chaque poisson était comptabilisé ! Son lancer et ses grands mulets qui remplissaient le congélateur… Les huîtres qu’il allaient arracher aux falaises, sa ceinture de plomb autour du ventre.  (gamine, je redoutais qu’il reste au fond…). Tous ces barbecues, ces fiestas où la table de ping-pong devant la maison permettait d’élargir le groupe des convives. Il y avait toujours une bonne raison pour se rassembler ! Mais aussi les cueillettes de champignons et puis les figues que j’adore (tout comme ma grand-mère). Il savait où se trouvaient les figuiers et nous partions en quête de ses fruits murs et sucrés (les blanches, les violettes). Et si ce n’était pas le moment, trop tard, ou trop tôt pour une belle récolte, nous ne revenions jamais bredouille ! Nous contentant de ce que la nature nous offrait, blettes, asperges sauvages, ou pissenlits.

Aimait chiner dans les vide-greniers.  Autre plaisir souvent partagé avec lui.  Nous adorions fureter ensemble. Nous partions tôt afin d’en faire plusieurs dans la matinée.  Outre le plaisir de dégoter quelques timbres pour lui (je lui en rapportais chaque fois, ses amis aussi, tout le monde mettait ses timbres de côté pour Jean, ou Jeannot !). Mais aussi des cuivres ! Matière noble par excellence qu’il a longtemps travaillée et qu’il a toujours aimée. Son rapport au cuivre, était très sensuel, Il lui fallait soupeser, regarder les impacts, les soudures, j’aimais ce regard de connaisseur dans son élément ! Là, non plus, nous ne revenions jamais bredouille. Le vide-greniers réserve toujours des surprises… J’aimais ces moments de complicité. Parfois, je découvrais des objets dont je ne connaissais pas l’utilisation, lui savait. Et si par hasard, il ne savait pas et que le vendeur était une femme, alors là, les yeux pétillants, il engageait la conversation, tendait les bras, riait.

Était un charmeur à n’en point douter ! Il faisait cela avec un naturel déroutant. Ne concevant même pas que moi, ou ses petits-fils n’aient pas cette aisance du contact. Il aimait être entouré d’amies et savait prendre soin d’elles. Délicat, attentif, en véritable gentleman…

Aimait la Nature, la flore. Il venait à la maison et repartait avec des tiges de plantes, pour faire des boutures. Puis, lorsque nous allions chez lui, il me donnait des pots d’autres plantes qu’il avait bouturées !  Chacun, lors de nos périples, nous récoltons des graines ou des boutures des plantes rencontrées.

Et la faune aussi ! Nous avons toujours eu des animaux à la maison, surtout des chats (son adorable Princesse va dorénavant vivre avec mes deux matous) et des chiens (Bobby, Coco, Op, Eclair, Juno…). Mais aussi d’autres moins conventionnels :  jeune, lorsqu’il était en Algérie, il avait envoyé un caméléon dans un colis à ses parents, puis des tortues. Etonnant, il venait d’acquérir de nouveau des tortues, un peu comme si la boucle était bouclée.  Un jour, il avait rapporté à la maison, une chouette effraie heurtée par un camion. Nous l’avons gardée quelques jours avant qu’elle ne reprenne son envol. Une autre fois, un impressionnant goéland qui gobait les poissons entiers qu’on lui présentait. J’ai travaillé des années dans une clinique vétérinaire, rapportant tous les oiseaux blessés que les vétos n’avaient pas le temps de soigner. Partageant avec lui cette curiosité, cet amour de toutes les bestioles de la création.

Aimait la vie qu’il ne cessait de mordre à pleines dents, jamais rassasié. Il avait une capacité à avoir des coups de foudre phénoménale. J’aime, mais je suis plus dans la continuité, rassurante… Certes, je suis comme lui, curieuse de l’autre, attentive mais lui, y croyait encore, chaque fois ! Je pense être un peu plus désenchantée, il m’arrive même parfois de dire que tout finit par passer, que ce n’est qu’une question de temps !  Lui, jusqu’au dernier souffle a eu cette capacité de tomber amoureux, follement. J’avais l’impression parfois d’être face à un ado qui ne gère pas ses premiers émois ! C’était troublant, mais très beau aussi !

Mon papa était un sacré bonhomme !!

Une cérémonie émaillée par les témoignages émouvants de ses amis, tout comme cette fin de soirée où tous en cercle nous avons évoqué des anecdotes vécues avec lui, m’ont rappelé que je suis bien la fille de mon père et pas qu’un peu !

Je suis terriblement fière de porter cet héritage que je ne cesse de transmettre à mon tour ! Je retrouve du reste, beaucoup de ses traits de caractère chez mes trois garçons. 

A l’inverse d’une empreinte carbone à limiter au maximum, l’empreinte de mon papa me pousse à continuer en marchant dans ses pas vers une vie qu’il faut dévorer. Bref, vivre pleinement en souvenir de lui…  Même si c’était mieux avant….  avec lui !

Papa, tu n’as pas fini de me manquer !

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